La routine avait repris ses droits dès mon retour à la librairie. L’odeur des pages anciennes, le tic-tac régulier de l’horloge au mur, tout me rappelait un quotidien que j’avais presque oublié pendant mon temps avec les loups. Ce sentiment de normalité, je l’avais tant regretté.
Mais ça n’a pas duré.
À peine avais-je eu le temps de me replonger dans cette familiarité qu’un tintement annonçait l’entrée d’un homme. Ses cheveux noirs étaient rejetés en arrière, mais c’étaient ses yeux, d’un rouge éclatant, qui captaient toute l’attention. Il dégageait une aura à la fois étrange et menaçante.
« Allison, c’est bien ça ? » Sa voix était suave, un sourire presque cruel étirant ses lèvres pâles. « Alors, c’est vous qui avez charmé l’Alpha. Comment une simple humaine a-t-elle réussi cela ? »
Un frisson de peur m’a parcouru, mais j’ai tenté de garder mon calme. « Je crois que vous faites erreur, » j’ai rétorqué, même si ma voix tremblait légèrement.
Son sourire s’est élargi, dévoilant des canines anormalement longues et acérées. « Ne jouez pas à l’innocente avec moi, » a-t-il murmuré en s’avançant, menaçant.
Je n’ai même pas eu le temps de réagir. Il était déjà trop près, ses dents s’enfonçant dans ma gorge. La douleur était intense, comme un feu se propageant dans mes veines, et un cri s’est échappé de ma bouche. Je me sentais faiblir, ma vie s’écoulant avec mon sang.
Le combat qui a suivi était un chaos indescriptible. Gabriel, sous sa forme de loup, a défoncé la vitrine pour intervenir. Sa fourrure grise se hérissait, ses yeux brillaient d’une rage pure. Sans hésiter, il s’est jeté sur le vampire, le désarçonnant complètement.
Ils se sont affrontés avec une violence inouïe, mais Gabriel, malgré les assauts rapides du vampire, a fini par prendre le dessus. Avec un rugissement victorieux, il a mis fin à l’affrontement, ses crocs trouvant la gorge de l’adversaire.
Revenu sous sa forme humaine, blessé mais déterminé, Gabriel s’est précipité à mes côtés. « Allison, reste avec moi, » a-t-il imploré, la peur teintant sa voix d’une note désespérée.
« Gabriel, » j’ai murmuré, luttant pour rester consciente, un faible espoir naissant en moi.
« Ne t’en fais pas, » a-t-il promis, serrant ma main dans la sienne. « Je suis là pour toi. Je ne te laisserai pas partir. »
Dans ce moment de peur et de danger, une certitude inébranlable s’est ancrée en lui : il ferait tout pour me protéger, quel qu’en soit le prix.
Alors que je me battais pour garder les yeux ouverts, sentant la vie s’effiler entre mes doigts, je pouvais voir la détermination dans le regard de Gabriel. C’était plus qu’une promesse ; c’était un serment inébranlable, un engagement qui dépassait la peur, la douleur, et même la mort elle-même.
Gabriel a agi vite, déchirant un morceau de sa chemise pour tenter de stopper le saignement à ma gorge. Son toucher était à la fois doux et désespéré, comme s’il essayait de me ramener à la vie par la seule force de sa volonté.
« Tu vas t’en sortir, Allison. Je te le jure, » murmurait-il, les mots se bousculant dans un flot de panique contrôlée.
Mais au fond de moi, une part acceptait déjà l’inéluctable. La froideur s’insinuait dans mes membres, et ma vision commençait à se brouiller. C’était étrange ; dans cet instant suspendu entre la vie et la mort, tout me semblait incroyablement clair. Gabriel, l’amour que je ressentais pour lui, l’importance de chaque moment passé ensemble – tout cela brillait avec une intensité poignante.
Pourtant, quelque chose en moi refusait de céder. Peut-être était-ce la force de l’amour de Gabriel, peut-être mon propre désir de vivre notre histoire jusqu’au bout. Peu importait les ténèbres qui s’approchaient, je voulais me battre. Pour nous.
Soudain, une lumière éclatante a percé la pénombre, accompagnée d’une sensation de chaleur envahissante. C’était comme si quelque force supérieure avait entendu la promesse de Gabriel, son appel désespéré à ne pas me laisser partir.